Michel Lukasiewicz est responsable de l’activité M&A chez Sport Value. Il est aussi mentor au Tremplin, le premier incubateur de startups dédiées au sport.
50 startups françaises viennent de se rassembler dans un collectif baptisé « Sportech », à quoi ressemble le marché français justement ?
Tout d’abord, il faut féliciter la création du ‘Sport tech 50’ français. C’est une excellente initiative qui démontre que le marché français est en train de grandir, et cela va je l’espère permettre aux acteurs de parler d’une seule voix et donc de gagner en visibilité.
Comme toute industrie en forte croissance et en structuration, la « Sportech » souffre aujourd’hui d’un déficit d’image et surtout de compréhension de l’environnement, des acteurs et des drivers macro-économiques qui tirent la croissance de ce marché. C’est pour cela que chez Sport Value, nous menons un travail d’éducation auprès des parties prenantes et notamment des investisseurs pour leur expliquer les subtilités de l’industrie et surtout, les accompagner dans le ciblage des risques et opportunités d’investissement. Et nous appuyons nos démonstrations par une quantité et qualité importante d’information et de data récoltées au cours de nos 15 années d’expérience.
Structurellement, certains segments de la Sportech n’ont aujourd’hui pas de leader clairement identifié mais un nombre important d’acteurs qui cohabitent. De réelles opportunités d’investissements existent, encore faut-il les avoir identifiées, ce que nous avons fait. D’autres segments ont des leaders qui émergent et qui sont en train d’asseoir leur position sur le marché français et qui se retrouve en face d’un gros défi : l’internationalisation.
Comment le positionneriez-vous par rapport à d’autres grandes nations ?
Que ce soit en termes de nombre de startups ou de montants levés, les USA sont bien évidemment en tête des classements. Pour donner un ordre d’idée, il y a eu près de 2 milliards d’€ levés aux USA en 2018 par la Sportech alors que le montant ne s’élève qu’à près de 400 M€ pour l’Europe, ce montant est tout de même en progression de plus de 30% par rapport à 2017.
En revanche, au niveau européen et en termes de nombre de startups, la France regroupe près de 10% des entreprises de l’écosystème, derrière le Royaume-Uni (30%), mais devant l’Allemagne et les pays Scandinaves.
Globalement, la conjoncture actuelle au sein de l’hexagone est très favorable, l’instabilité politique Outre-Manche risque de créer un moment de flottement pour les entreprises britanniques, que ce soit pour l’accès à certaines typologies d’investisseurs mais aussi dans la mise en œuvre de leur stratégie d’internationalisation renforçant ainsi la position de choix de la France au niveau européen. Par ailleurs, Paris 2024 crée un engouement sans précédent, d’une part beaucoup d’acteurs institutionnels y voient une opportunité, c’est notamment le cas de l’un des tops sponsors de l’événement qui vient de créer son fonds d’investissement dédié ; d’autre part la lumière suscite l’intérêt des fonds/investisseurs internationaux qui nous contactent pour sonder le marché.
Connu pour son écosystème « Tech » de grande qualité, Israël est aussi à la pointe dans le sport. Nous nous rendrons d’ailleurs au Sports Tech Nation à Tel-Aviv à la fin du mois de novembre pour y rencontrer les protagonistes de la région.
Sport Value est intervenu au début de l’été 2019 dans le cadre d’une levée de fonds réalisée pour le compte de MyCoach d’un montant de 6,6M€, quelles sont les missions que le cabinet a réalisées ?
Tout d’abord, au-delà des opérations classiques de levées de fonds, nous intervenons également sur des opérations de restructuration capitalistique, de transmission mais aussi en conseil à l’achat comme c’est le cas actuellement pour un groupe industriel sport français ou encore un fonds asiatique qui souhaite étoffer son portefeuille de participation dans le sport. Nous intervenons dans toute l’industrie du sport.
Dans le cas de MyCoach, le fonds d’investissement qui avait accompagné la société dans ses premiers tours de table cherchait une compétence sectorielle pour réaliser une levée de fonds significative. Nous avons accompagné le management de la société et le fonds dans la définition de la stratégie de levée, aussi pour que leurs intérêts soient alignés.
Ensuite, classiquement, nous avons préparé et peaufiné la documentation de levée (IM, BP et autres documents complémentaires) pendant qu’en parallèle nous définissions une liste de d’investisseurs à cibler qui seraient intéressés par cette opportunité. Nous avons organisé les premiers rendez-vous avec le management.
La dernière étape était la négociation sur la valorisation et les clauses du pacte, le but étant de trouver le meilleur deal possible pour chacune des parties prenantes, ce que nous sommes parvenus à faire.
Comment réussir une levée de fonds lorsqu’on propose une solution « Sportech » ? Les startups ne se précipitent-elles pas toutes vers cette solution, sans être bien préparées ?
Il faut bien avoir en tête qu’une levée de fonds n’est pas une prérogative dans le développement d’une société et encore moins une fin en soi, bien au contraire. Il ne faut pas « lever de fonds pour lever des fonds ». Aujourd’hui, beaucoup de startups disent souhaiter lever des fonds car elles sont à court de cash mais n’ont pas de stratégie bien ficelée. C’est le meilleur moyen de se « griller » sur le marché, c’est pour cela que l’accompagnement est primordial.
La levée de fonds est un équilibre complexe. Il faut adapter la stratégie en besoin de financement au stade de développement de la société ainsi qu’à la typologie d’investisseur que l’on cible.
Porter aujourd’hui un dossier Sportech et plus simple qu’il y a quelques années mais implique toujours des spécificités qu’il faut maitriser, notamment la description de certains business model spécifique (en BtoB par exemple), des habitudes d’usage et de consommation particulières ou encore l’approche globale du marché au sein duquel évolue la société. Sport Value maîtrise parfaitement les scopes d’investissement des différentes typologies d’acteurs (fonds sectoriel/généraliste, family office, industriels…) et leur intérêt pour le sport.